C'était hier, samedi 19 mars 2016, à l'Université de Kisangani. L'Abbé Reginald ALEMBE AKUKU, prêtre d'Isiro-Niangara, et formateur au Grand Séminaire Interdiocésain Philosophat Saint Augustin de Kisanga, défendait mon mémoire de philosophie en vue d'un Diplôme d’Études Spéciales (DES).
Abbé Reginald ALEMBE |
La défense s'est tenue devant un jury composé de:
1. Président : Prof BONGILO (Docteur
en Philos orientation : Philosophie morale, philosophie de l’éducation)
2. Secrétaire : Prof ATEKAMI (Docteur
en philos. Orientation : Anthropologie et philosophie africaine)
3. Directeur : Prof MAIDIKA (Docteur
en Philosophie. Orientation : Métaphysique)
Intitulée « L’affirmation originaire et la brisure de la
subjectivité dans la philosophie de Paul Ricœur », le travail défendu par l'Abbé Alembe porte sur la question
du sens de l’expérience de l’homme
total ou de l’expérience totale de l’homme comme puissance d’affirmation et comme subjectivité brisée. Il s’agit de
comprendre avec Paul Ricœur que l’affirmation
originaire se caractérise, au-delà de
la contradiction existentielle et de la brisure, par le pôle d’infinitude à
partir duquel se construit la subjectivité humaine. C’est seulement à partir de
ce mélange de finitude et d’infinitude que peut se justifier le sentiment
fondamental de non-coïncidence de soi à soi qui caractérise essentiellement la
subjectivité humaine.
Le concept d’affirmation originaire
désigne ainsi la puissance d’affirmation constitutive de l’homme par laquelle
il traverse la négation existentielle, vectrice de tristesse d’être, sous le
mode de la joie. L’affirmation originaire consiste, pour l’homme, à se
positionner comme capable d’exister dans une situation de finitude et de
contradiction empreinte de tristesse, c'est-à-dire comme capable d’affirmer
joyeusement son être, son être-soi, son être-chair et son être-au-monde.
C’est
donc la résistance au néant ou à la néantisation, caractéristique du concept
d’affirmation originaire, qui est l’objet de notre recherche sur la brisure de
la subjectivité humaine. L’anthropologie philosophique de Paul Ricœur est ainsi
présentée comme une anthropologie du « Oui » au-delà du
« Non » de l’existence humaine, c'est-à-dire au-delà de la brisure du
sujet humain.
Sur
le plan théorique, le travail donne l’occasion de reposer à nouveau frais la
question de l’être de l’homme qui a été obnubilée par la philosophie moderne de
la représentation. Celle-ci s’est plus penchée sur le sujet pensant et
constituant, et moins sur la densité ontologique de ce sujet. Aujourd’hui
encore, la question de l’être de l’homme est de plus en plus en train d’être
oubliée, dans un monde marqué par le progrès réalisé dans le domaine de la
science et de la technique, de l’informatique et de l’imagerie médicale. Du
coup, l’homme moderne a plus de mal à accepter l’échec et les aléas de
l’existence. Il est dès lors question de comprendre et de faire comprendre que
l’homme doit vivre le vrai sens de son existence en acceptant toutes les
négations qu’il ne peut jamais totalement supprimer tant qu’il reste homme. La
synthèse est donc théoriquement possible, dans l’existence de l’homme, entre la
négation et l’affirmation, entre l’échec et la réussite, entre la liberté
rationnelle et la nécessité existentielle.
Sur
le plan pratique, la présente étude permet à l’homme, en général, et à l’homme
négro-africain en particulier, d’avoir une vision réaliste de la vie et de
l’existence, qui implique un haut niveau d’aspiration et de confiance en soi et
en ses forces créatrices. C’est dans l’affirmation de soi et de ses capacités,
et dans l’action consécutive à cette affirmation que l’homme peut se sentir responsable de ses succès
et de ses échecs. C’est également en tant qu’affirmation qu’il peut avoir le
courage de dépasser ces échecs et de ne pas sombrer dans le désespoir ou dans
le suicide. La réflexion sur l’affirmation originaire et la brisure de la
subjectivité est donc une invitation à l’action et au refus de confondre le
bonheur et la réussite avec la vie facile, sans peine ni contradiction.
Par
ailleurs, cette étude intéresse également tout chercheur en anthropologie
philosophique, en métaphysique, en herméneutique, en phénoménologie
existentielle et en philosophie réflexive. En effet, la question de la
subjectivité se pose dans tous ces domaines de recherche. Ce travail, qui met
en évidence la puissance d’affirmation constitutive de l’homme, fournit au
chercheur un instrument théorique pour l’approfondissement du thème de la
finitude, de la faillibilité et du mal, que Paul Ricœur aborde dans l’eidétique
de la volonté (c'est-à-dire en deçà des actes posés), et pour la discussion de
tous les thèmes liés au problème de la subjectivité humaine.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire